Sept ans après Essential, les frères belges David et Stephen Dewaele reviennent avec un nouvel album ALL SYSTEMS ARE LYING. Les Dewaele sont aussi connus sous l'étiquette 2manydjs et comme de très bon remixeurs, insufflant une nouvelle vie aux morceaux de Gorillaz, Marie Davidson, Fontaines D.C. et Tame Impala. Mais avec ce nouvel album, Soulwax reprend possession de son territoire sonore.

Les deux frères le décrivent comme "un album de rock réalisé sans aucune guitare électrique", un miroir fracturé tendu à la société moderne au bord du gouffre, où la vérité est déformée par les filtres, les algorithmes et le bruit. Construit entièrement à partir de synthés modulaires, de batterie live, de magnétophones à bande et de voix traitées, l'album explore la dualité actuelle de nos obsessions technologiques : d'un côté leur impact sur l'art, la confiance et la société, de l'autre comment la spontanéité, l'intuition et l'analogique peuvent encore nous sauver.
Le résultat est bluffant.

Des morceaux comme "Idiots in Love" semblent reposer sur des riffs de guitare saturés, tout comme "Hot Like Sahara" ou le presque disco "The False Economy". C'est le tempo qui donne l'âme aux titres de Soulwax, et les frères se présentent eux-mêmes comme des batteurs ratés, d'où leur besoin de solliciter pas moins de trois batteurs (Iggor Cavalera, Blake Davies et Aurora Bennett) pour assouvir leur passion des cadences très marquées.

L'album s'ouvre sur "Pills and People Gone", comme un constat de fin de soirée, avant d'enchaîner sur "Run Free", sans doute leur meilleure création originale. Avec ses ondulations acid house, ses harmonies angéliques et sa fin de folie en électro déconstruite, ce titre nous plonge immédiatement dans une transe. "Polaris" déploie un suspense palpitant, comme si Philip Glass jammait avec Justice, tandis que le titre éponyme rappelle le groupe Visage avec ses fibrillations synthétiques nerveuses et ses claques percussives acérées.

Et sur plusieurs morceaux, le duo réussit un tour de force : faire sonner des synthés comme des guitares saturées notamment sur la techno-rock méthodiquement bouillonnante du titre "The False Economy", qui sonne comme une dénonciation des stratégies des réseaux sociaux, chantée sur un ton moqueur à la Trent Reznor. "Engineered Fantasy" porte l'ambiance vertigineuse et onirique du grroupe Tobacco, mais avec un chant plus clair et sincère.

Il existe même des sons expérimentaux débridés qui ne dépareraient pas dans un set de Laurie Anderson, avec "Meanwhile on the Continent" et le titre éponyme hypnotique et vertigineux qui intègrent des éléments de musique néo-motorik dans leur ADN.

L'album se termine sur "Engineered Fantasy" où le chant est parfaitement mis en valeur sur une sonorité électro pop, puis se clôt sur "Distant Symphony", une partition de clavier sans paroles, toute en douceur, comme pour atterrir après cette odyssée mouvementée dans le monde des systèmes peu fiables. Soulwax continue donc de brouiller les frontières entre rock et musique électronique, utilisant et maîtrisant le pouvoir du riff dans un contexte électronique. L'album ALL SYSTEMS ARE LYING marque un retour remarquable qui incorpore une multitude de sons tout en faisant bouger les hanches et tourner les têtes, prouvant que ces vétérans du dancefloor sont loin d'être épuisés, trente ans après leurs débuts.

https://soulwax.bandcamp.com/album/all-systems-are-lying

 

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