S’il y a bien un producteur dont on savait qu’il pourrait intégrer sa voix à sa musique de façon innovante, c'est bien l’anglais Clark, lui qui a déjà utilisé les voix d'autres artistes de façon saisissante, notamment sur l'envoûtant album Playground in a Lake de 2021. Et sur son nouvel album Sus Dog, l'ajout de son chant ne nuit pas à la complexité de son travail.

Clark saisit l'opportunité de s'exprimer d'une nouvelle façon sur son dixième album, et après avoir entendu la façon dont il associe sa voix de ténor légèrement ondulant dans les morceaux, il est presque décevant qu'il ne l’ait pas fait plus tôt. Heureusement, il ne change pas radicalement son approche, et au lieu de s'appuyer sur des structures de chansons classiques, l’album Sus Dog semble aussi exploratoire que son travail instrumental précédent, bien qu’augmenté d’une dimension émotionnelle supplémentaire.

Les thèmes qu'il aborde, trouver sa voix, chercher la vérité, conviennent parfaitement à son approche sur le morceau d’ouverture "Alyosha", qui juxtapose des voix pénétrantes et des respirations façonnées en rythmiques avec certains des arpèges de synthétiseur les plus impressionnants de Clark depuis son album Death Peak, et aussi au morceau "Town Crank", avec ses tonalités ondulantes, ses rythmes énergiques et ses harmonies luxuriantes.

Bien que Clark adopte une approche un peu plus directe sur la pop introspective de "Dismissive" et le déferlement de mélodies à la Bibio sur "Dolgoch Tape", l’album Sus Dog comporte également des moments qui pourraient même être plus surprenants encore que son travail instrumental.

Le plus important d'entre eux est sans doute le morceau "Bully", un voyage sinueux allant du désespoir quotidien à l'espoir et qui utilise les qualités les plus basses et les plus hautes du registre vocal de Clark pour un effet psychédélique stupéfiant.

Mais tout au long de ce nouvel album, on a l'impression qu'il a ouvert grand les portes à toutes les possibilités artistiques.

Sur le titre "Forest", il oppose des drones ambiants et des cordes au côté très bruts des prises de sons concrets avec des harmonies pures a cappella qui ne ressemblent à rien de ce qu'il a fait auparavant. Certaines voix reconnaissables entre toutes l'aident à sortir de sa zone de confort : Thom Yorke, qui a également produit l'album, apparaît sur "Medicine", un morceau en forme de suite qui rivalise avec Radiohead en termes de grandeur sombre.

Anika prête sa voix alto au morceau qui a donné son nom à l’album, qui ressemble à un lointain descendant des atmosphères fantomatiques de son album Body Riddle et suggère qu'une collaboration sur un album complet pourrait être une vraie bonne idée. Les deux instrumentaux de l'album ("Over Empty Streets" et "Wedding") sont bien conçus, mais ils semblent presque décevants comparés aux risques que Clark prend ailleurs.

Après plusieurs années d'œuvres plus sombres et aux thèmes plus évidents comme Playground in a Lake, Kiri Variations et Daniel Isn't Real, il est logique qu'il veuille s’aventurer vers quelque chose de plus éclectique et exploratoire, et la créativité exaltante de cet album Sus Dog est une preuve qu’il s’y est laissé aller en pleine confiance.

https://clark.bandcamp.com/album/sus-dog-2

Documentaire

Dernière émission

Nouveautés

Playlists du mois