Un troisième album sous le signe de l’anti-conformisme pour Beak qui aurait pu sortir un énième opus de musique motorique sombre mais cette fois ils ont décidé de rabattre quelque peu les cartes. Après 6 ans d’absence et l’intégration d’un nouveau musicien en la personne de Will Young du groupe Moon Gang’s, il était inévitable qu’un peu de changement allait s’opérer dans leurs compositions. Et questions nouveauté on n’est pas déçu, avec le quasi abandon de ces grooves rythmiques linéaires qui faisaient la marque de fabrique des deux précédents albums, et qui permet d’appuyer l’atmosphère troublée et étrange de leur patte musicale qui s’exprime à présent d’une toute nouvelle façon. Les voix qui servaient surtout de textures sonores auparavant sont à présent utilisés sur le devant du spectre sonore soutenus par un véritable songwriting cette fois.

Mais il ne faut pas s’y tromper, plus ils se rapprochent d’un songwriting traditionnel dans l’album, plus ils apparaissent étranges également.

En effet et le morceau “RSI” est d’ailleurs le seul morceau avec une rythmique motorique et qui s’approche le plus de ce qu’on pourrait attendre d’une version accessible d’un morceau du groupe Beak, avec sa cadence caractéristique et ses synthés de science fiction.

Partout ailleurs les morceaux dominés par le chant sont admirablement abimés et déconstruits, suggérant l’imminence de l’obscurité.

Le titre “Brean Down” par exemple est une improbable association entre les rythmiques complexes du groupe Can et la morosité et sinistrose désabusée de Nirvana.

Harvester est encore plus étrange, avec ses paroles qui vacillent entre le sinistre et le philosophique, lorsque Geoff Barrow chante “Gotta choose your battles if you wanna get home” par dessus des guitares sirupeuses et un violoncelle dépressif.

Le groupe a également exhumé le titre “When we fall” de son EP BEAK><KAEB de 2015 qui sonne toujours comme la BO de folk pastorale et symphonique d’un sombre film catastrophe des années 70

Tandis que le titre Birthday Suit et ses synthés méditatifs associe la beauté des travaux de musique à l’image de Geoff Barrow à son chant submergé par l’émotion.

Le talent pernicieux de Beak c’est de savoir mettre assez d’accroche pop pour compenser l’univers malaisant qu’ils nous assènent à longueurs de morceaux, et ce nouvel album est sans doute le plus divertissant et ambitieux à la fois de leur discographie, de par l'éclectisme de ses expérimentations. Les trois symboles “supérieur à” qui marquent le nombre d’album à leur actif apparaissent donc une astuce bien trouvée, car effectivement ils se sont encore une fois dépassé.

https://beak.bandcamp.com/

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